A quelles difficultés particulières les personnes LGBT (lesbiennes, gay, bisexuelles et trans*) sont-elles confrontées dans le monde professionnel suisse? Face à ces problématiques, comment établir un climat professionnel serein et égalitaire pour toutes et tous? Telles sont quelques-unes des questions qui ont été abordées les 28 et 29 novembre 2014 à Genève, lors de deux journées d’assises réunissant acteurs et actrices du monde du travail. Retour sur les enjeux et les pistes d’actions de ces assises, à travers les résultats de l’étude nationale « Etre LGBT au travail » et un bilan des deux journées.
Près de 300 participant.e.s des milieux professionnels des PME et multinationales, des institutions publiques, des organisations internationales et des syndicats ont pris part, les 28 et 29 novembre 2014, aux assises « La diversité au travail: un enrichissement mutuel – Comprendre les réalités professionnelles des personnes LGBT pour repenser le monde du travail ». Ces deux journées, organisées par la Fédération genevoise des associations LGBT, en partenariat avec les associations LWork, Network et la Haute Ecole de Travail Social de Genève, avaient pour buts de mettre en évidence les difficultés et les discriminations auxquelles les personnes LGBT sont confrontées dans le monde du travail et de réunir les acteurs et actrices du monde professionnel et économique pour dégager des pistes d’actions et des solutions concrètes.
Comprendre les réalités professionnelles des personnes LGBT : entre difficultés et discriminations
Les résultats de l’étude nationale suisse « Etre LGBT au travail », réalisée par l’Institut des Etudes Genre de l’Université de Genève et la Fédération genevoise des associations LGBT auprès de 1’097 répondant.e.s, mettent en évidence les quotidiens professionnels difficiles des personnes LGBT, avec une homophobie et une transphobie encore trop présentes qui se manifestent à travers notamment des gestes et propos obscènes, des mises en doute des compétences professionnelles et des mises à l’écart de projets intéressants. La peur de subir des discriminations et/ou le fait d’en subir accentue fortement le sentiment de vulnérabilité et d’isolement que peuvent ressentir les personnes LGBT au travail. Les personnes trans* sont touchées de plein fouet par les discriminations, encore davantage que les employé.e.s LGB. Les personnes lesbiennes subissent, elles, une double discrimination, entre sexisme et homophobie. Les familles arc-en-ciel ont également subi l’effet néfaste des manifestations contre le « mariage pour tous » en France.
Caroline Dayer, Enseignante et Chercheuse à l’Université de Genève, a souligné lors des assises que « les risques de chaque coming-out sont constamment soupesés. Ainsi, chaque coming-out est indissociable du contexte dans lequel il est fait. » La peur d’être la cible de violences ou d’injustices ainsi que l’énergie dépensée pour ne rien laisser transparaître entraînent des conséquences négatives sur la santé des employé.e.s: angoisse, stress et baisse de l’estime de soi. « Les personnes LGBT dépensent une énergie phénoménale pour cacher leurs histoires, leurs vies quotidiennes, pour contourner les questions gênantes, énergie qui n’est pas consacrée à la performance au travail » a rappelé Christophe Falcoz, Directeur du Cabinet RCF Management.
Repenser le monde du travail : pistes d’actions et bonnes pratiques
Face à ces constats, comment aménager un climat professionnel égalitaire pour toutes et tous, bénéfique aussi bien aux employé.e.s qu’aux employeurs/employeuses ? Poser un cadre qui ne tolère pas et sanctionne les manifestations d’homophobie et de transphobie; agir en amont de ces comportements en mettant en place une politique inclusive et égalitaire et en faire une des priorités; s’entourer d’allié.e.s, sensibiliser les employé.e.s et la hiérarchie; former des personnes ressources telles un.e responsable RH ou un.e médiateur/médiatrice: des bonnes pratiques déjà existantes en Suisse ont été présentées et des pistes d’actions et des ressources ont été dégagées ensemble avec les acteurs et actrices des deux journées. Aborder les questions LGBT au travail, ont rappelé l’ensemble des intervenant.e.s, permet de mettre en place un climat de travail stable, sans conflits, qui est bénéfique pour tout le monde, employé.e.s (LGBT ou non) et employeur/employeuse, établissant une confiance durable.
Les milieux professionnels suisses peuvent mieux faire
Plusieurs constats ont émergé lors des assises. Les milieux professionnels suisses peinent encore à s’emparer de la thématique. En effet, les politiques de diversité sont surtout présentes dans les entreprises multinationales, comme chez Thomson Reuters ou la Banque Barclays. Elles sont cependant quasi inexistantes dans les PME ou start-up suisses ou dans les entreprises qui n’ont pas une « culture » d’entreprise anglo-saxonne. Les questions trans* sont encore moins abordées que les questions LGB, alors que les personnes trans*, comme l’indiquent les résultats de l’étude, sont touchées de plein fouet par les discriminations, encore davantage que les personnes LGB.
Un autre constat est que les institutions publiques genevoises et les organisations internationales ont davantage avancé sur ces questions que le milieu du privé, avec les exemples positifs de la Ville de Genève, le Bureau International du Travail ou UN Globe.
Les résultats préliminaires de l’étude nationale « Etre LGBT au travail » corroborent ces constats. Peu de répondant.e.s ont indiqué que la charte de leur entreprise mentionne explicitement un principe de non-discrimination en lien avec l’orientation sexuelle – sans mention de l’identité de genre – et très peu indiquent que des actions concrètes ont été mises en place. Lorsque des employé.e.s ayant subi de l’homophobie ou de la transphobie se sont plaint.e.s à leur hiérarchie, aucune mesure n’a été prise dans 86% des cas.
Olivier Sandoz a rappelé, en ouverture des assises, le chemin qu’il reste à parcourir pour atteindre l’égalité au travail, que ce soit entre femmes et hommes ou pour les personnes LGBT: « Il en va de la responsabilité sociale des entreprises. »
L’homophobie et la transphobie dans les milieux professionnels suisses sont encore très présentes. Il y a donc urgence à agir pour que la Suisse rattrape son retard sur ces questions. Il s’agit d’égalité des chances, de bien-être et de santé des employé.e.s.
Téléchargez le bilan et les résultats de l’étude ci-dessous:
Communiqué de presse – 13.10.15
La Fédération genevoise des associations LGBT
www.federationgeneve-lgbt.ch – federationgenevoise.lgbt@gmail.com
Pour toutes questions :
Sur les résultats de l’étude « Etre LGBT au travail »:
Lorena Parini, maître d’enseignement et de recherche à l’Institut des Etudes Genre de l’Université de Genève et co-présidente de la Fédération – 076 662 84 67
Sur le bilan des assises:
Delphine Roux, coordinatrice des assises et de la Fédération – 076 437 84 14
La Fédération est composée des associations 360, Dialogai, Lestime, Parents d’homos et Think Out.
[1] Extrait d’un témoignage d’un répondant de l’étude « Etre LGBT au travail »